Deux menacent durablement et dramatiquement le monde du café, comme bien d’autres, si ce n’est tous les autres : le changement climatique et le niveau des prix du café.
En parlant réchauffement climatique, on ne considère souvent que les seules émissions de CO2, parfois, la montée des eaux, et depuis Irma, l’augmentation de la violence des phénomènes climatiques. En parlant de la conditions des agriculteurs, on se focalise sur les éleveurs de porcs et producteurs de lait de chez nous, et peu des autres, et encore moins d’ailleurs.
Or, le changement climatique a des effets effroyables sur tous les secteurs, et sur le premier d’entre-eux, notre alimentation, notre assiette, et notre tasse.
Et le changement, ce n’est pas demain comme on voudrait encore y croire, mais bien aujourd’hui.
Dans ce contexte noir et universel, nous ne pouvons que nous réjouir du succès du café, produit naturel et pur s’il en est. De plus en plus de monde aime et boit en effet du café à travers le monde ! Plus de 2 milliards de tasses sont servies chaque jour, et des continents entiers, qui l’ignoraient hier, le découvrent et l’adoptent aujourd’hui. C’est le cas de l’Asie et des pays comme la Corée, les Philippines ou le Vietnam dont la consommation croit de 8% par an selon l’OIC. La consommation mondiale du café a doublé en 20 ans. Et on sait ce trend durable, un jour tous les pays du monde auront rejoint les consommations de l’Italie, 6,5kg/an voire celle de la Norvège 12kg/an.
Tous ? Vraiment ?
Et bien non, car ils n’en auront ni le temps ni la possibilité. Le changement climatique et la volatilité des cours depuis la libéralisation du marché dans les années 80, font que le café est en voie d’extinction.
Si, si, près de 60% de la surface de production mondiale serait directement menacée à l’horizon 2050 selon l’Organisation Internationale du Café, et la totalité selon certaines études dont la prestigieuse revue Nature Plants, en 2080. Des pays comme l’Ethiopie, berceau et arche de Noé de l’Arabica sont menacés à plus de 60%. Bref, le café devient rare, et nos rituels quotidiens autour d’un café sont menacés.
Et pour preuve, depuis plusieurs années, alors que la consommation mondiale croît sûrement, +1,5% par an, la production, elle, stagne et même décline. On estime à plus de 3 millions de sacs (60kg) l’écart entre les besoins et la production : 180 milles tonnes, soit la moitié de la consommation française. Au Brésil, premier producteur mondial, la production de 2017 est annoncée en recul de 12%.
Que se passe-t’il donc ?
Comme toutes les plantes, le caféier est extrêmement sensible à son milieu et pousse dans des biotopes aux températures clémentes, 18-25°C, à l’humidité importante mais point trop, et au stress hydrique raisonné.
Or depuis plus d’une décennie, le réchauffement de la planète rend impropre les terroirs de basse altitude, la hausse des précipitations et des pluies diluviennes favorisent les glissements de terrains, le lessivage des sols, et surtout les pandémies. Certains vergers d’Amérique Latine et Centrale ont été ainsi ravagés par la Rouille, un champignon de la feuille, proche de notre Iodium. 60% du verger du Honduras, 60% du Guatemala, autant en Colombie et la liste serait longue, et ce, en quelques années, rappelant ainsi les ravages du phylloxéra qui avait anéantie plus de 90% du vignoble français en quelques années et non en décennies. Au Guatemala on estime ainsi que la Rouille à fait perdre 100 000 exploitations en deux ans…
En Afrique, c’est un autre champignon qui s’attaque aux fruits et non aux feuilles, mais avec les mêmes effets dramatiques. Et tous les observateurs et professionnels annoncent déjà que la caféiculture, extrêmement fragile, ne pourra pas redémarrer si elle venait à être touchée comme l’a été l’Amérique Latine par exemple. Imaginez un instant si on vous disait, que demain, 60% de la Beauce serait bientôt impropre à la céréaliculture ? Ce sera peut être le cas d’ailleurs.
En effet, après de telles pandémie, les producteurs sont ruinés, et doivent replanter et attendre 3 ans avant la première récolte. Que font-ils pendant ce temps ? Ils partent et abandonnent leurs plantations, comme au Pérou ou au Guatemala.
On constate ainsi à une déprise rurale et à des exodes rurales exponentiels dans les pays producteurs. La réalité méconnue du café est que ses 70 millions de producteurs sont de petits producteurs familiaux, souvent vivant de polyculture.
Parallèlement, le café est peut-être la seule denrée alimentaire dont les cours sont au niveau de ceux d’il y a 30 ans… alors même que les pays producteurs se sont développés et que le niveau de vie a augmenté et que la vie s’est renchérie.
Les producteurs du monde entiers sont donc au bord de la ruine. Les industriels, notamment les 5 qui trustent 80% du marché mondial en état d’alerte !
Alors que faire ? Quelles sont les solutions ?
Elles sont au moins de deux types.
- La voie du progrès, celui du toujours plus et de la politique que l’on sait aujourd’hui vicieuse : du toujours plus de technologie, de technicité, de dépenses, d’investissement et donc de dettes, d’appauvrissement des hommes et surtout des sols : variétés modifiées ou ogm et donc payantes et stériles, techniques culturales fortement technicisées (irrigation etc…), intrants chimiques etc… soit des coûts de productions délirants. Au Brésil, on estime ainsi qu’ils sont passés en deux décennies de 20 à plus de 30% des coûts. Or, ces coûts sont aujourd’hui, pour les petits et moyens producteurs supérieurs au cours du café. Comment le savons nous ? Car c’est déjà le cas ! C’est tellement le cas que même le industriels qui veulent garantir leurs approvisionnement, et même plus leur qualité, achètent déjà au dessus du marché.
- La voie du progrès, mais le vrai, celui qui prend en compte les vrais besoins fondamentaux de la plante et des agriculteurs est celle du sol. Toutes les études montrent en effet que le meilleur moyen de lutter contre le réchauffement climatique est d’améliorer la qualité du sol et surtout de l’humus. La FAO (pas vraiment pro hippie et bobo) en a fait sa priorité en 2015, l’agroforesterie, la biodiversité, les méthodes cultures sans intrants mais associant les ressources. se diffusent et montrent combien elles peuvent en peu de temps, dans les pays tropicaux, régénérer le sol.
- Ces deux voies auront parfois des points communs comme la migration des zones de production : vers des zones de plus hautes altitudes, des zones au climat plus froid aujourd’hui, laissant ainsi sur le carreau des millions de producteurs et des millions d’hectares de caféicuture. Mais comme bien souvent la solution est une synthèse, et pour faire de l’innovation culturale on a besoin de technicité, mais d’une technicité qui s’inspire de la nature et qui n’est pas prédatrice, d’une solution symbiotique.
Vous l’aurez compris c’est pour cela que L’Arbre à Café est investi depuis 2009 dans les agricultures durables comme la Biodynamie, qui est aujourd'hui la méthode qui recrée le plus rapidement et efficacement de l’humus sans coût d’achat. L’Arbre à Café a adopté aussi dès ses débuts pour le Direct Trade afin acheter directement au producteur à des prix hors marché afin qu’ils vivent de leur travail, qu’ils investissent dans la qualité, et oeuvrent.
Et vous savez quoi ?
On ne peut, vous et moi, que se réjouir !
Si si, car selon le dernier sondage Ifop de septembre 2017, plus de 70% des Français sont prêts à changer leurs consommations alimentaires pour compenser le changement climatique, mieux 87% sont prêt à réorienter leur consommation vers des produits plus responsables humainement et environementalement. Logique puisque 93% pensent que les pesticides et autres intrants chimiques ont un impact sur leur santé, et autant sans doute, savent que sans producteur et sans zone de production, nous n’aurons plus à manger.
L’autre source d’émerveillement est que les producteurs que nous accompagnons et dont vous appréciez au combien les produits figurent aujourd’hui tous parmi les meilleurs producteurs de la planète. Ainsi, nos producteurs du Brésil, du Panama, d’Inde et du Pérou ont tous été distingués en 2017 et reconnus comme produisant les meilleurs cafés de leur pays. Il y a encore peu, on les prenait pour des originaux. De là, à ce qu’ils deviennent des modèles…