Qu’il s’agisse de glace, d’éclair, d’opéra, de confiserie, ou de chocolat, le « goût » café me rebutait définitivement et agissait sur moi comme un véritable répulsif. Et pourtant, parmi les chefs d’oeuvre patrimoniaux de la pâtisserie française trônent le Moka et l’Opéra, et sur tous les étales des pâtisseries : les éclairs et les religieuses au café. C’est que le café avait un intérêt à être pâtisser !
Or, ce goût, plat, morne, sans vie ni complexité, arrêté et monolithique, ne relève que d’une amertume désagréable et d’une odeur de céréales brûlées.
En commençant dans le métier, après avoir succombé aux charmes du café de spécialité, travailler avec les pâtissiers a donc été une évidence. Et cela tombait bien car, à l’initiative de Pierre Hermé, la pâtisserie avait bien entamé sa révolution contagieuse vers la pâtisserie haute couture, mêlant exigence technique, créativité inédite et qualité des produits. Mais à la fin des années 2000, personne encore ne s’était encore vraiment penché sur le café en lui-même. La norme était dans toutes les maisons, et l’est encore dans l’extrême majorité d’entre-elles, d’utiliser des ersatz industriels du café : concentré ou café lyophilisé le plus souvent. Les professionnels les plus proches du produit associaient à ces deux béquilles chimiques, des cafés industriels de basse qualité et trop brûlés, et les repassaient au four pour en extraire encore davantage d’amertume et de goût de carbone. C'est qu’ils cherchaient, comme en cuisine, puissance et notes empyreumatiques. Dès lors, la palette aromatique du café se réduisait à l’amer, à la puissance, et au brûlé, sa couleur elle, à ce marron verdâtre et uniforme mais parfaitement brillant et couvrant.
Ce qui paraîtra comme évident dans quelques années, ne l’était pas il y a peu encore : respecter le produit, comprendre tout ce qu’il peut apporter sont les bases de tout artisanat. Le café peut être utilisé vert (cru), mi-cuit ou torréfié, il ne doit jamais être de nouveau cuit ou passé au four ou plongé dans une liquide, souvent crème ou lait, chaud, faute de quoi, il exprimerait des arômes les moins nobles. Les variétés, les torréfactions, les origines peuvent être choisies en fonction du but à atteindre, des goûts à apporter. La mouture, sa fraîcheur et sa taille, et les temps d’infusion permettront de moduler l’intensité aromatique et chromatique. Ainsi, les pâtisseries au café seront aussi diverses et singulière que les cafés eux-mêmes et chaque artisans pourra alors exprimer son identité dans les pâtisseries au café !
C’est que qu’on déjà fait notamment Jacques Génin, Pierre Hermé, Sébastien Gaudard, Alex Croquet, Claire Damon, Katty Caroline, Sophie Sauvage, Jonathan Blot, Cédric Grolet, François Perret ou Eric Verbauwhede et quelques autres, pour ne citer que les pâtissiers d’échoppe, ou encore Pierre Geronomi pour parler également des glaces.
COLLECTION FETISH : dialogue gourmand entre 2 passionnés | Pierre Hermé x Hippolyte Courty
Le goût du détail de Pierre Hermé et son insatiable curiosité le conduisent à débusquer ce qui se fait de meilleur en toute chose. L’apprentissage, la découverte sont dans sa nature. Parfois, il prend des mois, quelques fois des années, cherchant inlassablement à percer le mystère de certains produits. Le café appartient à cette catégorie. Pierre Hermé s’est intéressé à cette saveur dont on croit tout connaître. Résultat ? Un incroyable Fetish Infiniment Caféné du dialogue gourmand entre le pâtissier et Hippolyte Courty, fondateur de “L’Arbre à Café”.
Son point de départ ? La Tarte Infiniment Café imaginée par Pierre Hermé en 1999. Lors de leur première rencontre, Pierre Hermé demanda à Hippolyte Courty de goûter cette tarte. En toute simplicité. Hippolyte goûte : s’il apprécie la recette, il n’y retrouve pas pour autant ce goût café qui lui fait courir le monde et les plantations. Il propose donc à Pierre Hermé de le guider à travers son monde du café.
Des crus d’une qualité exceptionnelle, soigneusement sélectionnés. Un monde de nuances, de plants, de fruits, de taille, de maturité, de torréfaction, de préparation. Ensemble, ils dégustent des cafés de toutes origines, pour n’en retenir que deux. Pendant des mois, Pierre Hermé et les pâtissiers de l’atelier de création explorent les techniques. Comme à son habitude, Pierre Hermé enregistre toutes les nuances, toutes les saveurs... Longueur en bouche, textures, toute une palette de nouvelles sensations, de nouveaux goûts, qui viennent enrichir son répertoire gourmand. Au long de son voyage initiatique, Pierre Hermé découvre d’abord la diversité des goûts qu’offrent les différentes variétés de café. Il en retient deux. Deux facettes très originales. Son parti pris : faire découvrir des dimensions du goût du café jusqu’alors inexplorées, ouvrir de nouveaux horizons. L’alchimie des recettes peut commencer. Chaque étape compte. La mouture. La température de l’eau. Le temps et le mode d’infusion, à froid ou à chaud, quelques minutes ou quelques heures... Premier élu : le Iapar Rouge du Brésil. Un café de terroir, à la fois puissant et doux, un nuancier aromatique faite de notes de chocolat, de cannelle et d’épices embellies par un arôme dynamique d’eucalyptus. Puis, Pierre Hermé se passionne pour le Bourbon Pointu du Piton des Neiges de la Réunion. Un café d’Exception, rarissime, dont la délicatesse singulière se livre dans la longueur, pour offrir un plaisir de méditation sans artifice. Au gré de ces créations, la puissance du Iapar et la subtilité du Bourbon Pointu se répondent et c’est l’un des attraits de ce Fetish Infiniment Café de nous révéler toutes les dimensions que le café peut offrir. Chemin faisant, Hippolyte Courty fait également découvrir à Pierre Hermé la cascara, pulpe de café, aux vertus digestives, avec ses notes sucrées, ses arômes de fruits rouges et d’épices et également le café vert aux notes végétales évoquant pois, haricot vert ou concombre. Guidé par Hippolyte Courty, Pierre Hermé a dessiné les courbes de cette généreuse collection, un itinéraire audacieux de sensations et de plaisirs... couleur café.Une incroyable profusion de moments d’émotionnée d’une rencontre de deux passionnés du goût.
Retrouvez les créations caféinées signatures dans le numéro 22 de Fou de Pâtisserie.